Sécurité Connectée

Cette sonnette scanne le visage de tous les passants (et c’est légal ?)

Par Mathieu Carlier , le 20 octobre 2025 , mis à jour le 20 octobre 2025 - 10 minutes de lecture
Amazon Ring Cette sonnette scanne le visage de tous les passants (et c'est légal )

Vous pensiez que votre sonnette connectée servait juste à voir qui sonne ? Détrompez-vous. Avec la nouvelle fonction « Familiar Faces » d’Amazon Ring, c’est carrément votre visage qui est scanné, stocké et analysé. En France et en Europe, où le RGPD veille au grain, cette nouveauté fait grincer des dents. Selon une étude de la CNIL, 67% des Français se disent préoccupés par la collecte de données biométriques à leur insu. Sans consentement explicite, cette technologie transforme chaque passage devant une porte en scan facial involontaire.

La promesse ? Des notifications personnalisées genre « Tonton Marcel est à la porte ». La réalité ? Une surveillance généralisée du quartier qui fout carrément les jetons. Dans cet article, découvrez comment cette tech fonctionne réellement, pourquoi elle pose problème pour votre vie privée, quelles alternatives existent pour sécuriser votre maison sans devenir Big Brother, et comment vous protéger si vos voisins l’utilisent.​

A retenir : TL;DR

  • La nouvelle fonctionnalité Ring scanne et enregistre les visages des visiteurs et passants.

  • Amazon défend une fonctionnalité opt-in mais ignore le consentement des personnes filmées.

  • Les risques incluent piratage de données biométriques et partage avec les autorités.

  • Privilégiez les marques européennes avec stockage local pour protéger votre intimité.

Comment fonctionne la reconnaissance faciale Ring ?

Qu’est-ce que Familiar Faces exactement ?

Familiar Faces, c’est la nouvelle fonctionnalité phare d’Amazon Ring lancée fin 2025. Le principe ? La caméra analyse les traits de votre visage pour créer ce qu’on appelle une « empreinte faciale » (ou faceprint en anglais). Cette empreinte est ensuite stockée dans l’application Ring et comparée à chaque nouveau visage détecté. Concrètement, vous tagez vos proches dans l’app ; un peu comme sur Facebook. Ring les reconnaît automatiquement lors de leur prochaine visite.​​

Au niveau scientifique, la reconnaissance faciale repose sur des algorithmes de deep learning qui extraient des points de repère du visage (distance entre les yeux, forme du nez, contour de la mâchoire). Ces données sont converties en vecteurs mathématiques uniques, quasi impossibles à falsifier. Le problème ? Contrairement à un mot de passe, votre visage ne se change pas. Si ces données fuitent, c’est game over pour votre vie privée.​

Ring Familiar Faces reconnaissance faciale et vie privée

Pourquoi Ring lance cette technologie maintenant ?

Amazon a dévoilé cette fonctionnalité lors de son événement hardware de septembre 2025, aux côtés de ses premières caméras 4K avec la technologie « Retinal Vision ». L’objectif officiel ? Réduire le nombre d’alertes intempestives en filtrant les visages connus. Fini les notifications « personne détectée » toutes les 5 minutes quand le facteur ou votre voisine passent.​

Mais soyons honnêtes deux secondes : c’est surtout une course à l’armement technologique. Google Nest propose déjà cette fonctionnalité depuis plusieurs années , et Amazon ne pouvait pas rester à la traîne. Le marché de la sécurité connectée représente des milliards, et la reconnaissance faciale, c’est le nouveau Graal pour les fabricants. Sauf qu’entre innovation et intrusion, la frontière est sacrément floue.​

Quels risques pour votre vie privée ?

Peut-on être scanné sans consentement ?

Là, ça devient vraiment flippant. Imaginez : vous passez devant la maison d’un voisin pour aller chercher votre pain, et PAF, son Ring scanne et enregistre votre visage. Aucune notification, aucune demande de consentement, nada. Les défenseurs de la vie privée tirent la sonnette d’alarme, et à raison : cette technologie collecte des données biométriques de n’importe qui entre dans son champ de vision.​

Le Washington Post a clairement pointé du doigt ce problème de collecte non autorisée. Livreurs, facteurs, voisins, simples passants ; tout le monde est potentiellement fiché. Et ne comptez pas sur Ring pour vous prévenir : la marque se contente de dire que « les propriétaires sont responsables de respecter les lois locales ». Pratique pour se dédouaner, non ? Seuls l’Illinois, le Texas et Portland (Oregon) échappent à ce cauchemar grâce à leurs lois strictes sur les données biométriques.​

Que deviennent vos données faciales ?

Une fois scannée, votre empreinte faciale part directement dans les serveurs d’Amazon. Et là, mystère total sur la durée de conservation, les mesures de sécurité réelles ou les possibilités de revente. Amazon a déjà eu plusieurs scandales de fuite de données et de piratage de Ring par le passé. Autant dire que niveau confiance, on repassera.​

Le risque de piratage est loin d’être théorique. Si un hacker accède à ces bases de données, il peut potentiellement usurper votre identité biométrique pour déverrouiller des systèmes de sécurité, commettre des fraudes ou vous traquer. Et contrairement à votre carte bancaire qu’on peut bloquer, votre visage, lui, reste identique. C’est le genre de donnée qu’on ne devrait JAMAIS confier à une entreprise avec un historique de sécurité aussi douteux.​

Ring et la police : le combo qui dérange

Parlons peu, parlons flicage. Ring entretient des liens étroits, et controversés, avec les forces de l’ordre américaines depuis des années. Même si l’entreprise a annoncé en 2024 ne plus transmettre automatiquement les vidéos aux flics sans mandat, l’arrivée de la reconnaissance faciale change la donne. Selon Ars Technica, Ring s’associe désormais avec Flock, une société dont la technologie a été utilisée par l’ICE (Immigration and Customs Enforcement).​

Cette alliance pourrait transformer les sonnettes Ring en réseau de surveillance de masse accessible aux autorités. Les risques de profilage racial sont énormes : les algorithmes de reconnaissance faciale se plantent régulièrement sur les visages de personnes racisées, particulièrement les femmes noires. Un faux positif, et vous voilà suspecté à tort. Flippant, non ?​

Comment Ring se défend-elle ?

Les arguments du fondateur Jamie Siminoff

Jamie Siminoff, le fondateur de Ring, défend bec et ongles sa création. Selon lui, Familiar Faces « élimine les suppositions » et permet de « savoir immédiatement quand quelqu’un d’inconnu rôde » devant chez vous. L’argument sécuritaire, classique mais efficace auprès des propriétaires flippés par les cambriolages.​

Ring insiste aussi sur le fait que la fonctionnalité est désactivée par défaut : les utilisateurs doivent volontairement l’activer et « enroller » les visages de leurs proches. En théorie, personne n’est scanné sans que le proprio du Ring n’ait d’abord activé consciemment la fonction. Sauf que cette logique oublie volontairement un détail crucial : les passants, eux, n’ont jamais donné leur accord.​

Les restrictions géographiques suffisent-elles ?

Face au tollé, Amazon a désactivé Familiar Faces dans trois zones : Illinois, Texas et Portland. Ces États ont des lois ultra-strictes sur les données biométriques qui imposent le consentement préalable. Ring préfère carrément bloquer la fonction plutôt que de risquer des poursuites.​

Mais franchement, trois États sur cinquante aux USA, c’est la goutte d’eau dans l’océan. Et en Europe ? Rien n’est encore clair concernant le déploiement sous le RGPD. Amazon teste souvent ses produits aux USA avant de les adapter (ou pas) au marché européen. Si Ring débarque chez nous avec Familiar Faces, gare aux amendes de la CNIL : le RGPD considère les données biométriques comme ultra-sensibles et impose un consentement explicite.​

Quelles alternatives pour sécuriser sa maison ?

Les sonnettes connectées sans reconnaissance faciale

Heureusement, Ring n’a pas le monopole de la sonnette connectée. Plusieurs marques proposent des alternatives respectueuses de la vie privée. Arlo, Eufy ou encore Netatmo offrent des caméras performantes avec détection de mouvement, vision nocturne et notifications push, mais SANS analyse faciale.​

Netatmo, marque française, mise notamment sur le stockage local des vidéos via carte SD ou serveur perso. Vos données restent chez vous, point barre. Arlo propose des abonnements cloud chiffrés de bout en bout. L’image est peut-être légèrement moins nette que du 4K Retinal Vision, mais au moins vous dormez tranquille sans surveiller tout le quartier.​

Le retour du judas et de l’interphone classique ?

Ça peut sembler rétro, mais parfois la simplicité reste la meilleure alliée de la vie privée. Un bon vieux judas grand-angle coûte 15 euros en magasin de bricolage et ne collecte AUCUNE donnée. Pas de wifi, pas de piratage, pas de serveur Amazon qui stocke vos faits et gestes.​

Pour les immeubles, l’interphone vidéo avec moniteur intérieur reste une valeur sûre. Certains modèles récents proposent même des écrans couleur HD et enregistrement local sur carte mémoire. Vous gardez le contrôle total de vos images, et personne ne vient mettre son nez (ou son IA) dans votre intimité. Old school mais efficace.​

Comment vous protéger si vos voisins utilisent Ring ?

Vos droits face aux caméras de surveillance

En France, la loi est claire : filmer l’espace public (rue, trottoir) est strictement interdit pour les particuliers. Seule la propriété privée peut être filmée. Si la caméra Ring de votre voisin vise votre jardin, votre entrée ou la voie publique, il est en infraction. Vous pouvez exiger qu’il réoriente sa caméra ou déposer plainte.​

Concernant les données biométriques, le RGPD vous accorde un droit d’accès, de rectification et d’effacement. Si vous découvrez qu’un voisin a enregistré votre visage via Familiar Faces, vous pouvez exiger la suppression de ces données. En cas de refus, la CNIL peut intervenir avec des sanctions jusqu’à 4% du chiffre d’affaires de l’entreprise responsable.​

Les astuces pour brouiller la reconnaissance faciale

Si vous êtes vraiment parano (et franchement, on vous comprend), quelques techniques permettent de tromper les algorithmes. Porter une casquette et des lunettes de soleil modifie suffisamment votre géométrie faciale pour déjouer la plupart des systèmes. Les masques sanitaires, encore populaires, brouillent aussi efficacement la reconnaissance.​

Des artistes et activistes ont développé des textiles à motifs géométriques spécifiques qui « aveuglent » les IA de détection faciale. Ces vêtements, appelés « adversarial fashion », créent des patterns que les algorithmes interprètent comme du bruit visuel. Stylé et efficace, mais bon, faut assumer le look cyberpunk dans la rue.​

L’avis de la rédac’

Franchement, cette histoire de Ring qui scanne les visages, ça fout les jetons. On comprend l’envie de savoir qui sonne chez soi, vraiment. Mais de là à transformer chaque porte d’entrée en poste de contrôle biométrique, il y a un gouffre éthique qu’Amazon franchit allègrement. Le pire ? C’est vendu comme une « amélioration de confort » alors que c’est clairement une surveillance de masse privatisée.

Chez Le Blog Domotique, on adore la domotique intelligente, les maisons connectées et tout le tralala. Mais pas à n’importe quel prix. Votre visage, c’est votre identité la plus intime, pas une clé numérique qu’on balance dans le cloud d’une entreprise qui a déjà prouvé sa négligence en sécurité. Si vous voulez vraiment une sonnette connectée, regardez du côté des marques européennes qui respectent le RGPD. Votre vie privée vaut mieux qu’une notification personnalisée.

Mathieu Carlier

Blogueur passionné (ou acharné) j'ai d'abord créé Deco Tendency puis Le Blog des Tendances, Drone Trend et enfin Le Blog Domotique.

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